Programme FNB - Le FNB - Démocratie - Insécurité - Islam - Armes - Armée belge - Santé - Féret - Le Bastion - Emploi - Enseignement - Vos élus - |
LA Démocratie est en danger !
LA Démocratie à la Belge Un certain Charles de Secondat, Marquis de la Brède, plus connu sous le nom de Montesquieu, a formulé en 1748 dans son « Esprit des Lois » le principe de la séparation des pouvoirs, qu’il estimait indispensable pour éviter la tyrannie. Il y a généralement un large accord sur cette vision des choses. Force est cependant de constater que ce principe n’est guère appliqué dans la Constitution belge. L’article 36 de cette dernière dispose par exemple que « Le pouvoir législatif fédéral s’exerce collectivement par le Roi [comprenez le gouvernement], la Chambre des Représentants et le Sénat. » Où est la séparation des pouvoirs? Quant au pouvoir judiciaire, il était nommé et promu – essentiellement sur la base de critères de fidélité politique – par le Roi [comprenez le gouvernement], dans certains cas sur présentation du pouvoir législatif (Article 151). Nous attendons de voir si l’instauration relativement récente d’un Conseil supérieur de la Justice changera réellement les choses. En pratique, il faut avouer que si le pouvoir judiciaire dispose malgré tout d’une relative autonomie, il n’en est rien du pouvoir législatif totalement subordonné à l’exécutif. Comme le fait judicieusement remarquer Friedrich von Hayek dans son monumental ouvrage « Droit, Législation et Liberté », la double fonction de contrôle politique et de légiférer dévolue au pouvoir législatif a inversé le rapport de force entre législatif et exécutif, à l’avantage de ce dernier: le pouvoir législatif ne fait plus qu’entériner les projets transmis par l’exécutif ! La loi est donc devenue un instrument de gouvernement. Ceci explique l’inflation législative, l’instabilité chronique des textes légaux, leur absence de vision à long terme, et la qualité souvent douteuse de leur rédaction. La loi n’a plus de rapport avec la coutume ou la volonté populaire: au contraire, elle vise de plus en plus à modifier les mœurs! La réforme des institutions, devenue permanente, les rend incompréhensibles pour le commun des mortels. Fruit de négociations de marchands de tapis, elles sont à la fois incohérentes et compliquées à souhait. Plus personne, hormis les politiciens et constitutionalistes, ne sait qui fait quoi, ni surtout qui est responsable de quoi! Une telle évolution remet en cause le principe essentiel selon lequel nul n’est censé ignorer la loi, fondement de l’Etat de Droit et favorise le clientélisme politique: il faut recourir aux politiciens pour connaître ses droits et savoir où s’adresser. Le Bastion a déjà présenté un tableau peu reluisant de nos institutions dans un article intitulé « La démocrature » reproduit dans le N°71. Mais, dans les faits, la situation est bien plus grave que ce constat déjà extrêmement pessimiste. De plus en plus souvent, les projets de loi sont présentés dans la presse comme acquis, avant même d’être discutés dans les assemblées. Bien pire, chaque ministre lance dans les médias sa petite idée, sans que le citoyen lambda ne puisse plus faire la différence entre une idée, un projet acquis ou un texte approuvé... La récente valse des ministres d’un niveau de pouvoir à l’autre, sans même une ébauche de négociation entre partenaires de coalition et la désignation de ministres (et donc de leurs suppléants) sans même un simulacre de débat parlementaire, démontre à suffisance, pour ceux qui n’en étaient pas encore convaincus, que le vrai pouvoir se situe au sein des appareils de partis. Et sans doute à l’exception des Verts, les partis démocratiques n’ont pas grand chose de démocratique dans leur fonctionnement. Les partis politiques sont des machines à conquérir le pouvoir: ils fonctionnent comme des armées, parce que pour la conquête, il n’y a pas d’autre organisation plus efficace. Mais tout le monde sait que le fonctionnement d’une armée efficace n’a pas grand chose de démocratique. Les élections internes, la confection des listes, les congrès ne sont que des simulacres de démocratie. Ce sont les appareils de parti qui décident de qui sera élu, de qui sera ministre, et négocient en comité restreint les programmes de gouvernement. Les textes et motions des congrès sont imprimés avant même d’être discutés ou votés. C’est à ce niveau aussi que se négocient et se décident les nomination des magistrats et des fonctionnaires, ainsi que leurs promotions. Tout se fait en dehors de toute transparence, parfois en dépit des règles de droit et toujours en l’absence de toute démocratie. C’est ainsi que l’on raconte déjà dans les couloirs de la rue de Naples qu’Antoine Duquesne ne fait que chauffer la place de président pour son successeur qui – népotisme oblige – serait le fils du gros Louis. Mais bien sûr, il y aura des élections pour la forme. Les récentes élections à la présidence de l’ex-PSC ne font pas exception à la règle. Lorsque Nothomb, avait battu – contre toute attente – de 23 voix, en mars 96, la candidate officielle Milquet, il n’avait pu se maintenir longtemps en place contre l’appareil du parti. En fait, on est revenu au moyen-âge: les fiefs et magistratures se transmettent de père en fils ou d’amant en maîtresse. La majorité de nos parlementaires ne sont-ils pas des fils de …? Mais le pouvoir réel est-il bien situé au sein des partis? En partie oui. Mais seulement en partie... Les appareils de partis ne sont le plus souvent que le relais de groupes de pression plus ou moins occultes. Le pouvoir est diffus. Il est le résultat d’une série d’interactions complexes au sein de réseaux de relations officieuses. Bref, tout le contraire de la transparence démocratique. (Bastion n°74 d'octobre 2003) |