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LA NOTION DE DJIHAD

 DANS LES 

RELATIONS INTERNATIONALES 

DE L'ISLAM

 

 par Robert ANCIAUX,

"Questions approfondies d’institutions musulmanes" (2e partie CHAPITRE I.)

ULB (P.U.B. Cours – Librairie 3e édition 1991-1992/1)  

Les relations entre l'Islam et le monde non musulman sont, par définition, conçues sous un angle fondamentalement conflictuel dans la doctrine islamique classique. Et ceci apparaît de manière évidente dans la division du monde entre dâr al Islam (la maison de  l'Islam)  et  dâr  al  harb  (la  maison  de  la  guerre) officiellement établie par les docteurs de la Loi.

Pour fonder leurs opinions, rassemblées dans des traités de jurisprudence (livres de fiqh), oû se trouve consignée la Loi de l'Islam  (la Shari’a),  les théologiens-juristes  ('ulamâ'  et fuqahâ') se réfèrent à des versets du Qoran et a la tradition du Prophète   (la   Sunna).   Parmi   les   versets   établissant l'impossibilité pour les musulmans et les polythéistes d'exister ensemble, citons dans la sourate IX, le verset 5: "Quand les mois sacrés seront expirés, tuez les infidèles quelque part que vous les trouviez! Prenez-les! Assiégez-les! Dressez pour eux des embuscades! S'ils reviennent (de leur erreur>, s'ils font la Prière et donnent l'aumône (zakât), laissez-leur le champ libre! Allah est absoluteur et miséricordieux."

Le sens de ce verset est clair: les polythéistes devront être combattus jusqu’à ce qu'ils se convertissent à l'Islam. Mais les musulmans  connaissent  encore  d'autres  ennemis  que  les polythéistes:  les gens du livre  (ahl al Kitâb),  juifs et chrétiens, qui reçurent une révélation dont les musulmans se disent aussi les héritiers, mais qui refusent de reconnaître Muhammad comme le dernier prophète,  sceau de la prophétie. Ceux-là aussi devront être combattus jusqu’à ce qu'ils se soumettent à l'autorité musulmane, comme le prescrit le Qoran, IX, 29: "Combattez ceux qui ne croient point en Allah ni au Dernier Jour, (qui) ne déclarent pas illicite ce qu'Allah et son Apôtre ont déclaré illicite,  (qui) ne pratiquent point la religion  de  Vérité,  parmi  ceux ayant  reçu  l'Ecriture! (Combattez-les)  jusqu'à  ce  qu'ils paient  la  djizya  (la capitation), directement (?) et alors qu'ils sont humiliés ».

Contrairement aux polythéistes qui n'ont d'autre choix que la conversion à l'Islam ou la mort, les gens du Livre, s'ils se soumettent à l'autorité de l'Islam peuvent garder leur religion moyennant le paiement d'une capitation.

L'obligation de soumettre les populations qui refusent l'Islam se trouve encore affirmée sans ambiguïté dans le hadith (récit de la vie du Prophète, consigné dans la Sunna) suivant: "J'ai reçu l'ordre de combattre les gens jusqu à ce qu'ils disent: "Il n'y a d'autre divinité que Dieu". Alors ils seront garantis contre moi pour ce qui est de leur personne et de leurs biens sous réserve (de l'application) de la Loi musulmane, et leur compte sera auprès de Dieu (qu'Il soit glorifié et exalté)".

Le devoir assigné à la communauté musulmane par la révélation et les paroles du Prophète est clairement énoncé: elle a pour mission de propager la parole de Dieu afin d'établir sur le monde l'ordre voulu par Lui. Et l'instrument par excellence de cette propagation sera le djihâd.

Le terme de djihâd, que l'on traduit généralement par guerre sainte, signifie aussi effort de dépassement de soi, et présente dans la théorie musulmane deux aspects:

1.         le petit djihâd: c'est-à-dire les expéditions guerrières; aspect qui retint principalement l'attention des musulmans et des théologiens-juristes dans les premières années de l'expansion de l'Islam et à l'époque classique;

2.         le grand djihâd: effort sur soi pour triompher de ses passions, et s'améliorer de manière constante, préalable à l'instauration de la suprématie de l'Islam dans le monde. A la période contemporaine la primauté est donnée à cette deuxième forme de djihâd dans la mesure où la décadence du monde musulman l'a placé sous la domination des puissances du dâr al harb, et où la nécessité d'opérer un redressement interne à l'umma, apparaît comme la condition sine qua non pour se débarrasser de la tutelle étrangère.  C'est la conception développée par le mouvement réformiste depuis le XIXe siècle; c'est aussi la position des frères musulmans et d'autres mouvements islamistes contemporains.

Dans la théorie légale de l'Islam, fondée sur un système de références comprenant: le Qoran, la Sunna et les actes des proches compagnons du Prophète (en l'occurence, ici, les deux premiers khalifes),  mises en oeuvre selon une méthodologie éprouvée, le djîhâd est énoncé comme une obligation collective de la communauté, conduite obligatoirement dans cette démarche par le chef de la communauté lui-même.

Au lendemain de la mort du Prophète, pour éviter la désagrégation de la jeune communauté musulmane menacée par une succession de sécessions de nombreuses tribus bédouines, Abû Bakr, le premier khalife, restaurera l'unité de la communauté musulmane en Arabie en lançant les tribus à la conquête des Etats non musulmans voisins. Le dijhâd, seul type de guerre permise par le Qoran, qui avait mis hors-la-loi toute autre forme d' opération guerrière, agit donc comme un ciment pour les divers groupes arabes soudés dans  une  entreprise  sacrée,  de  surcroît  prometteuse  de récompenses dans l'au-delà et de richesses en ce bas monde.

Les guerres d'expansion visant à instaurer un ordre islamique ne furent pourtant pas une initiative du seul Abû Bakr. Celui-ci put, en effet, invoquer le précédent du Prophète pour légitimer une telle démarche.

Muhammad  fut,  en  effet,  l'initiateur  des  deux  premières expéditions lancées contre l'Empire byzantin: une première fois à Mu'ta, en 629, une deuxième fois à Tabuk, en 630.

Dès le départ, l'organisation du djihâd est strictement codifiée. Ainsi, les hostilités ne peuvent être déclenchées sans qu'une invitation à se convertir n'ait été préalablement envoyée à l'ennemi que l'on se prépare à attaquer. L'idée qui prévaut ici est qu'il faut éviter de verser le sang. Si l'on peut assurer l'expansion de l'Islam par la persuasion et par des moyens pacifiques. Un hadith est particulièrement révélateur a ce sujet qui fait dire au Prophète: "O musulmans, ne souhaitez pas la rencontre de l'ennemi; demandez à Allah la paix. Mais lorsque vous rencontrez l'ennemi;  soyez endurants et sachez que le Paradis est à l'ombre des sabres." L'exemple est d'ailleurs donné par Muhammad lui-même dont nous reproduisons ci-dessous, à titre d'exemple, la missive envoyée à Heraclius, empereur de Byzance:

"Au nom d'Allah, le bienfaiteur miséricordieux, De la part de Muhammad, serviteur et envoyé d'Allah, à Heraclius, chef des Fûm. Salut à quiconque suit la bonne voie. Après quoi je t'appelle à la foi musulmane. Convertis-toi et tu sera sauve. Convertis-toi, Allah te donnera une double récompense. Si tu te détournes  de  l'Islam,  tu  seras  responsable  du péché  des laboureurs (?). O détenteurs de l'Ecriture! venez a un terme commun entre vous et nous! (à savoir) que, (comme vous), nous n'adorons qu'Allah et ne Lui associons rien, (que) les uns et les autres nous ne prenons point de seigneurs  (sic) en dehors d'Allah! S'ils tournent le dos, dites-(leur) (sic): Attestez que nous sommes soumis (muslim)  (à Allah)" (Qoran,  III,  57/64) (Tabari, Ta'rîkh al rusûl wa al mulûk, éd. de Goeje, Brill, Leiden, 1879-1901, p. 1561.

D'autres missives du même genre furent aussi envoyées à Muqawqis, gouverneur d'Egypte, à Chosroès Il, roi de Perse, et au roi d' Ethiopie.

De la même manière, on peut faire remonter au Prophète les règles générales de conduite à observer en temps de guerre. Ainsi ce hadith condamnant les excès des combattants: "Selon Abdallah, une femme fut trouvée assassinée au cours d'une expédition du Prophète (à lui bénédiction et salut). Alors le très Saint Envoyé réprouva le meurtre des femmes et des enfants."

L'attitude générale du Muhammad en période de guerre a été perpétuée par ses proches compagnons;  témoins,  les règles générales de conduite édictées par le khalife Abû Bakr, qui se réclame, en la matière de l'exemple du Prophète:

"O peuple, je te prescris dix règles; étudie-les bien. Ne trahis pas, ne t'approprie pas indûment une part du butin; ne pratique pas la tromperie et les mutilations; ne tue pas un jeune enfant, un vieil homme ou une femme; ne déracine ou ne brûle pas un palmier ou ne coupe pas des arbres portant des fruits; n'abats pas un mouton, une vache ou un chameau, excepté pour de la nourriture. Tu rencontreras des gens qui se sont mis à part dans des hermitages; laisse-les accomplir le but pour lequel ils ont fait ceci. Tu rencontreras des gens qui t'apporteront des plats avec diverses sortes de nourritures; Si tu partages avec eux, prononce le nom de Dieu sur ce que tu manges. Tu rencontreras des gens qui ont rasé le sommet de leur crâne, laissant une bande de cheveux autour; frappe-les de l'épée. Va au nom de Dieu et puisse Dieu te protéger de l'épée et de la pestilence." (Tabari, op. cit., p. 1850).

Ces actes du Prophète et des premiers khalifes seront les sources qui fonderont la Loi de la guerre énoncée dans la théorie légale classique élaborée par les grandes écoles juridiques (nous ne citerons dans ce cours que les opinions émises par les quatres écoles juridiques sunnites ayant subsisté jusqu'à nos jours). Si celles-ci s' accordent sur l'obligation pour le chef de l'Etat d'inviter l'ennemi a se soumettre avant de le combattre, elles divergent par contre entre elles sur des questions de modalités secondaires. Ainsi, les théologiens-juristes des écoles hanafite et mâlikite, estiment que, même Si un avis avait été déjà notifié a l'ennemi au cours d'une période antérieure, il convient de refaire la démarche peu avant que l'on ne se décide à déclencher les hostilités. Pour les 'ulamâ' de l'école shâfi'ite, le chef de l'Etat a le choix entre deux démarches: soit ne pas renouveler l'avertissement déjà adressé au cours d'une période antérieure s'il estime cette attitude conforme aux intérêts supérieurs de l'Islam; soit renouveler l'invitation à se soumettre s il estime que l'ennemi pourrait se soumettre sans qu'il faille recourir a la guerre. Les tenants de l'école hanbalite, enfin, estiment que les scriptuaires déjà avertis depuis les débuts de l'Islam, ne doivent pas être mis en demeure une seconde fois; toutefois Si les ennemis sont des païens, qui n'ont jamais entendu parler de l'Islam, il convient de les inviter à se convertir avant de diriger une expédition contre eux.

La notion de djihâd dans la théorie légale de l'Islam, est inséparable de la notion de guerre juste. Et la guerre ne peut être juste que Si elle est menée "dans le chemin de Dieu" en respectant  les  règles  énoncées  par  les  dogmes  et  les commandements de Dieu. Ainsi, la guerre est juste si:

-                      on  a  essayé  de  soumettre  d'abord  l'ennemi  par  la persuasion,

-           la guerre est conduite dans la voie de Dieu pour amener les incroyants a croire,

-           elle est conduite par une autorité légitime,

-           le commandement des troupes est exercé par un musulman.

Si la guerre est menée dans de telles conditions, le djihâd est le chemin le plus sûr et le plus direct vers le Paradis, comme en témoigne la sourate LXI, versets 11-12, du Qoran:

11.       "Vous croirez en Allah et (en) son apôtre! Vous menerez combat dans le chemin de Allah, par vos biens et vos personnes! Cela est un bien pour vous, Si vous vous trouvez savoir."

12.       "(Si vous faites cela, Allah) vous pardonnera vos péchés et vous fera entrer dans des jardins sous lesquels couleront des ruisseaux,

A. et   (dans)   des   demeures agréables, dans les jardins d'Eden. C'est là le succès immense."

B. dans lesquels vous aurez des épouses purifiées et où vous resterez immortels."

Ces dispositions à l'égard de ceux qui meurent en combattant dans le chemin d'Allah sont encore répétées à plusieurs reprises dans le Qoran et dans la Sunna, dont on peut citer à titre d'exemple ce hadith: "Il y a cent étages au Paradis qui sont prévus par Allah pour ceux qui combattent dans sa voie".

La notion de guerre juste est donc, on le voit, capitale dans la définition de la violence permise, puisque le salut éternel dépend de l'observance stricte de ce qui est permis ou défendu. Sur certains points, toutefois, d'appréciation de ce qu'est la guerre juste, les théologiens-juristes, 'ulamâ' et fuqahâ, n'ont pu atteindre l'unanimité. C'est ainsi qu'il existe, dans l'Islam sunnite, deux courants d'opinion qui jugent différemment la notion de guerre juste selon qu'elle est offensive ou défensive.

L'interprétation majoritaire à l'époque classique considère que l'Islam, vraie religion de salut pour l'humanité, doit s'étendre, au besoin, mais pas nécessairement, par la force sur la totalité du monde habité.

L'interprétation minoritaire à l'époque classique développe, quant à elle, une théorie purement défensive du djihâd: selon cette tendance, en effet, la guerre juste ne concerne que la défense de l'Islam, de sa terre et des fidèles contre les attaques de l'ennemi. L'expansion de l'Islam ne doit, dans cette optique, être assurée que par la propagande et la persuasion. Cette analyse du djihâd a surtout été développée à l'époque contemporaine, notamment par le courant réformiste, alors que l'Islam s'est trouvé dominé par des puissances non musulmanes. Dans ce contexte, les guerres de libération menées contre les dominations coloniales entrent totalement dans cette définition du djihâd, dans la mesure où les conditions de la légitime défense sont, ici, pleinement réalisées.

Outre les théories sunnites que nous venons de développer ci-dessus, il existe encore des théories propres aux tendances minoritaires de l'Islam, parmi lesquelles nous n'évoquerons que les shî'ites et les khâridjites.

Pour les shi'ites, depuis l'occultation du dernier imâm[1], il ne saurait être mené des combats offensifs; en attendant le retour de l'imâm caché, seuls des combats menés pour la défense de la communauté musulmane peuvent être considérés comme des guerres justes.

Pour les khâridjites,  le djihâd est une guerre permanente, universelle  et  totale  -  visant  aussi  les  musulmans  non khâridjites - contre un ordre mondial globalement injuste.

Sur le plan de la théorie de la mobilisation collective de l'Umma pour l'accomplissement du djihâd, le Qoran lui-meme opérait certaines distinctions entre les obligations découlant de la guerre défensive et de l'expédition offensive.

Ainsi la guerre offensive ne devait-elle pas nécessairement mobiliser la totalité de la communauté, comme le suggère la sourate IX, verset 123: "Les croyants n'ont point à se lancer (en campagne), en totalité. Pourquoi, de chaque fraction parmi eux, un groupe ne se lancerait-il point (en campagne) pour s 'instruire en la religion et avertir les siens, quand (ce groupe> reviendra à eux? Peut-être seront-ils sur leurs gardes." L'exemption, pour cer~ains groupes sociaux de la communauté, de participer àl'effort armé,  peut aussi  se comprendre par le  fait que l'accomplissement de certains travaux,  comme la fabrication d'armes, la fourniture de nourriture, la prestation de soins aux malades et aux blessés, constituaient un indispensable soutien à l'effort de guerre des combattants. Un hadith tiré de la Sunna du Prophète exemplifie d'ailleurs parfaitement l'un des rôles attendus des femmes dans les opérations guerrières: "Al Robayy', fille de Mu' awwid" a dît: nous assistions aux expéditions du Prophète (à lui bénédiction et salut); nous donnions à boire aux combattants, nous les servions, nous soignions les blessés, et nous ramenions les morts."

Au contraire de ce qui vient d'être dit à propos de la guerre offensive, la guerre défensive, elle, transforme, en cas de nécessité, tous les membres de la communauté, y compris les femmes et les enfants, en combattants armés.

*

Le dernier point de doctrine que nous aborderons maintenant concerne le caractère permanent ou non de l'institution de djihâd.

Rappelons que le djihâd a pour but de transformer le dâr al harb en dâr al Islam. Dès lors, tant que la totalité des peuples n'est pas entrée dans le dâr al Islam, en tant que convertis ou tributaires soumis à l'autorité d'un pouvoir musulman, l'Umma reste soumise à l'obligation de poursuivre le djihâd. En principe donc, le djihâd est considéré comme la base permanente des relations du dâr al Islam avec ses voisins du dâr al Harb.

Toutefois, le but de l'Islam n'est pas d'institutionnaliser, dans le monde, un état de guerre permanent. En effet, dès le moment où le monde sera transformé en un unique dâr al Islam, le djihâd perd sa raison d'être, sauf à devoir continuer le combat contre les ennemis de l'intérieur, à savoir:

-           contre les apostats,

-           contre les schismatiques,

-           contre ceux qui nuisent à l'ordre public et violent la Loi,

-           contre la corruption et les tentations du diable qui menacent l'Umma de l'intérieur.

La finalité du djihâd est, ainsi, l'instauration d'un état de paix  juste  pour  l'humanité  dans  sa  totalité.  Et  seule l'impossibilité ou s’est trouvé l'Islam d'instaurer, dans le monde, une pax islamica, a déterminé l'existence, tout au long de l'histoire, d'un état de guerre permanent entre l'Islam et les parties du monde qui refusaient de se soumettre à la Loi islamique.

Quand, à l'époque contemporaine, la puissance de l'Islam fut mise en échec par l'Occident chrétien, des spécialistes du droit public semblent avoir tacitement admis que le principe du djihâd comme guerre permanente était devenu obsolète, dans la mesure ou il était contraire à l'intérêt général de l'Islam. Ces juristes conclurent donc qu'une suspension de facto de l'obligation de djihâd imposée à l'Umma s'imposait comme une nécessité (MASLAHA). Ce qui ne veut pas dire que l'obligation légale de djihâd était abrogée. Et c'est bien ainsi qu'un grand nombre de 'ulamâ' l'entendent aujourd'hui. Si l'on sait que l'ensemble de ces lois édifiées au cours des trois premiers siècles de l'Hégire, doit, en théorie, être pris en compte par tout Etat musulman sunnite qui, aujourd'hui, se veut ISLAMIQUE, puisqu'au Xe siècle l'Islam sunnite a décrété l'interdiction de rien changer aux traités de Loi tels qu'ils avaient été rédigés à l'époque,  on mesure l'importance que peuvent revêtir les dispostions que nous venons de passer en revue,  pour l'avenir immédiat des  relations internationales. D'autant plus que certains Etats ont renoué ces derniers temps avec l'Islam institutionnel; et que, dans la plupart des pays musulmans, des courants d'opinions en pleine expansion récusent l'ordre international existant et réclament la formation d'Etats islamiques fondés sur le respect des prescriptions de la Shari' a.

Quoi qu'il en soit des développements prévisibles d'un activisme islamiste contemporain, il convient de noter que, très tôt déjà, les docteurs de la Loi avaient élaboré, dans leurs traités, des dispositions instaurant entre le dâr al Islam et les Etats non-musulmans, des relations autres que celles fondées sur la guerre. Ce sont celles-ci qui retiendront notre attention dans les chapitres qui vont suivre.

 

 



[1] Dans la théorie shî'ite, seuls peuvent être considérés comme des chefs de la communauté légitimes, les descendants du Prophète par 'Ah, son gendre, et Fâtima, sa fille préférée. Devant l'impossibilité d'instaurer un pouvoir légitime shî 'ite, les ismâiliens, au VIIIe siècle, et les duodécimans (shî'isme officiel dans l'Iran contemporain), au IXe siècle ont proclamé la fin du règne terrestre des imams, le dernier imâm ayant exercé cette fonction sur terre étant considéré non pas comme décédé, mais comme s'étant retiré dans un lieu inaccessible d'où il attend que ses fidèles aient instauré une ère de lumière pour revenir régner sur terre.

 

 

 

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