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Présenter des listes électorales
La loi belge prévoit que les partis qui ne sont pas suffisamment représentés dans l’assemblée concernée doivent faire présenter leurs listes de candidats par un certain nombre d’électeurs présentants (entre 200 et 500 par circonscription aux élections régionales, 5000 aux élections sénatoriales et européennes). Jusqu’ici, cela peut sembler normal : il faut éviter des candidatures fantaisistes. Le problème, c’est que le recueil de ces signatures est un véritable parcours du combattant, comme nous allons le voir ci-dessous et n’empêche en rien la présentation de listes folkloriques (ZUT, RALBOL, CHOPE, TARTE…). De nombreux électeurs mécontents signent en effet très volontiers pour la présentation de ces listes, histoire de manifester leur dégoût, mais refusent de parrainer des petites listes d’opposition, par peur des représailles. Certaines de ces listes fantaisistes ont d’ailleurs recueilli moins de voix que de signatures… La récolte des signatures est en elle-même un véritable pensum. Aucun petit parti n’a assez de membres pour recueillir le nombre requis d’électeurs présentants. Il faut donc procéder à une récolte dans des lieux publics ou accessibles au public. Cette méthode présente de nombreux problèmes. Notamment de voir un adversaire signer et prétendre par la suite que cette signature est un faux, vu qu’il n’a jamais signé pour un concurrent. Il y a également dans certains cas des vexations par les autorités locales : contrôles d’identité au poste de police, intimidations, expulsion des lieux… La
loi prévoit l’utilisation d’un extrait de la liste des électeurs à
l’appui de chaque signature de présentation. Il faut donc commander dans les
délais légaux ces listes des électeurs par lettre recommandée : frais
pour les 262 communes wallonnes et les 19 communes bruxelloises – sans compter
les communes non-bruxelloises de l’arrondissement de Bruxelles-Hal-Vilvorde)
– 1.264,5 euros rien que
pour la poste ! La plupart des administrations communales ne délivrent ces
listes des électeurs, sous divers prétextes, qu’après le dépôt des listes
électorales ! Quand elles les fournissent à temps, il faut la plupart du
temps réceptionner ces listes sur place après une longue attente au guichet.
Cela se traduit par des milliers de kilomètres à parcourir et de nombreuses
heures d’attente… Quand la liste est enfin obtenue, il faut trouver
l’extrait pour chaque signature de présentation dans un dossier parfois très
volumineux et généralement non classé par ordre alphabétique. Puis en faire
une photocopie… Les listes des électeurs, quand elles sont fournies sur un
support informatique (CD-Rom ou disquette) sont souvent fournies sous format
graphique qui ne permet pas une recherche informatisée. Parfois même, ce
support est fourni détérioré (non vérifiable à la réception) et donc
inutilisable (fichiers corrompus) : il n’est pas possible légalement de
commander une nouvelle copie payante, car on est alors hors délais légaux… Pour
éviter cet obstacle quasi insurmontable, il faut donc apporter les signatures
de présentation aux administrations communales pour faire vérifier si le
signataire est bien inscrit sur la liste des électeurs de la commune concernée.
Ceci ne peut se faire qu’entre la clôture des listes des électeurs et le dépôts
des listes de candidats : le délai est parfois très court, 9 jours
ouvrables pour les dernières élections européennes (couplées aux élections
régionales), en pleine période de vacances scolaires. Il faut donc faire le
tour de centaines d’administrations communales en 9 jours pour faire « légaliser »
les signatures d’électeurs présentants. Un véritable parcours d’obstacles :
il faut généralement attendre son tour au guichet, quand on ne vous renvoie
pas à un autre guichet, voire dans une autre « antenne administrative ». Après
avoir déposé les signatures, on vous demande généralement de revenir les
rechercher « quand elles seront prêtes »… Dans certains cas, on
refuse de vous signer un reçu, quand on ne refuse pas de vérifier les
signatures sous divers prétextes (on a autre chose à faire ; ce n’est
pas prévu par la loi ; on n’a pas encore reçu la liste des électeurs ;
le responsable est en congé…) Il
faut de nouveau attendre pour récupérer les signatures. Si on n’a pas de
formulaire de reçu, certains prétendent ne vouloir rendre les formulaires de
signature ! Certaines
administrations refusent, annulent, barrent ou déchirent les formulaires sous
des prétextes divers : illisible, nom du mari et pas de jeune fille, faute
d’orthographe ou d’attention… Lorsque le formulaire est annulé, barré ou
déchiré, il n’est plus possible de corriger. Dans certains cas, des
formulaires impeccables ont été annulés sous un faux prétexte pour des
motifs manifestes d’opinion politique. Un certain nombre de signatures sont
enfin refusées pour des motifs légaux légitimes (changement de domicile, non
électeur…). Certains
bourgmestres et échevins exigent de vérifier personnellement les noms des électeurs
présentants pour connaître leurs adversaires politiques et dans certains cas
envoient la police locale « pour vérifier si l’électeur a bien signé »,
ce qui peut être interprété par les intéressés comme une pression morale. Il
faut déposer les listes au bon endroit et dans les délais, ce qui peut être
moins évident qu’il ne paraît… Il
arrive enfin qu’entre le dépôt de la liste et l’acceptation définitive,
un certain nombre de signatures soit subtilisé par un concurrent : ceux-ci
peuvent consulter les signatures de présentation dans un local laissé sans
surveillance… Ceci s’est passé lors du dépôt des listes FNB pour la Région
Bruxelloise : une centaine de signatures manquaient, alors qu’elles
avaient été comptées par quatre personnes différentes avant le dépôt. Dans
certains cas, le bureau électoral refuse purement et simplement d’accepter la
liste, sous des motifs fallacieux, voire sans aucun motif, comme pour la liste
FNB lors des dernières élections régionales à Liège. Dans d’autres, il
exige des conditions non prévues par la loi comme à Namur, où la liste des
candidats doit figurer sur le formulaire de présentation pour être sûr que
l’électeur savait bien quels candidats il présentait… Rappelons
que les nouveaux partis ne sont pas soumis une fois pour toutes à ces mesures,
mais qu’ils doivent s’y soumettre à chaque scrutin. Et que cela se produit
au moment de la campagne électorale : les petits partis sont astreints à
des procédures dilatoires et vexatoires pendant que les partis installés font
campagne, faut-il le rappeler également avec des moyens d’un tout autre ordre !
L’accès
au médias. Nous
sommes dans une démocratie-spectacle. Le passage dans les médias, surtout
audio-visuels, et plus particulièrement à la télévision est le facteur
essentiel de changement de l’opinion. Seuls les partis possédant un groupe au
Conseil de la Communauté Française ont accès à la télévision. Si l’on
n’a pas au moins quatre élus, on ne peut accéder à la télévision, et si
l’on ne passe pas à la télévision, on ne peut avoir d’élus. La seule
chance reste donc de défrayer la chronique par des scandales ou en adoptant des
positions extrémistes, auquel cas, on a alors toutes les chances d’être
poursuivi. Le
« dispositif électoral » de la RTBF est un véritable scandale
antidémocratique. Nous l’avons attaqué devant le Conseil d’Etat :
rejet de la procédure en suspension, faute d’urgence ! Quant
à la presse écrite subventionnée, inutile d’avoir quelque espoir : les
journalistes eux-mêmes vous disent entre quatre yeux qu’il n’y a plus de
liberté de presse… Inutile
d’essayer de passer une publicité payante dans un journal : cela est
systématiquement refusé. Inutile également de demander à des distributeurs
professionnels de travailler pour vous : s’ils acceptent, il vont perdre
ipso facto des clients bien plus intéressants financièrement ! Or,
si vous n’existez pas dans les médias, vous n’existez pas politiquement.
Comment dans ces conditions avoir quelque chance de percer ? L’accès
au financement des partis. Il
n’y a pas de financement public tant que l’on n’a pas d’élu au
Parlement Fédéral. Et tant que l’on n’a pas de financement public, il
n’y a guère de chances d’obtenir un élu : les dons privés aux partis
politiques de plus de 500 € par an sont interdits et les dons de 125 à 500
€ doivent être publiés ! Le CRISP critiquait, dans un cahier déjà
ancien [1], ce mode de financement comme favorisant les partis en
place. En
dehors du financement public fédéral, les partis installés perçoivent
encore, directement, des moyens publics considérables (en espèces et en
nature) et, indirectement, via des personnes morales subventionnées. Rien de
tout cela pour les petits ou nouveaux partis : une asbl subventionnée qui
soutiendrait un parti non traditionnel risquerait de perdre rapidement ses
subventions publiques ! Sans
argent, sans personnel rémunéré, quelles chances a-t-on ? Le
système électoral Le
système électoral belge favorise les partis en place. Seuls ceux-ci bénéficient
d’une protection de leur sigle. Seuls ceux-ci participent à un premier tirage
au sort des numéros de liste et donc peuvent obtenir un numéro inférieur ou
égal à 10. Or les listes sont classées en fonction de leur numéro : la
plupart des électeurs lisent de gauche à droite et de haut en bas. Plusieurs
études démontrent qu’un petit numéro est un avantage non négligeable. Les
partis installés possèdent donc un avantage considérable sur les autres
partis. Si
l’on ne présente pas une liste pour le Sénat ou pour l’Europe (ce qui
impose le recueil de plus de 5000 signatures), on ne peut pas obtenir un numéro
de liste identique dans chaque circonscription (chambre ou région), ce qui
constitue un sérieux désavantage : d’une part, il faut adapter sa
propagande (affiches, tracts…) à chaque circonscription, ce qui occasionne
des frais supplémentaires, d’autre part, cela jette la confusion dans
l’esprits de certains électeurs qui voient des numéros de liste différents
d’une circonscription à l’autre. Et même quand les conditions légales
sont remplies et que l’on fait la demande pour obtenir partout un même numéro,
on ne l’obtient pas toujours (ce qui est illégal, mais quel recours a-t-on ?) :
ceci fut le cas lors des dernières élections régionales pour tous les petits
partis francophones en dehors du Hainaut. Il n’y a pas de recours ! Bien
plus, pour la Région Bruxelloise, lors du dernier scrutin, on a procédé pour
les petits partis candidats aux régionales à une attribution des numéros supérieurs
à 10 déjà attribués pour le scrutin européen : on était sûr ainsi
d’introduire un maximum de confusion dans l’esprit des électeurs. Ainsi, si
tous les partis installés possédaient un numéro identique pour le scrutin
européen et pour les élections régionales, quelles que soient les
circonscriptions, les petits partis candidats à Bruxelles se sont vus attribuer
non seulement des numéros différents suivant le scrutin (Europe, Région) et
suivant les diverses circonscriptions et ce parfois en toute illégalité, mais
ils ont de plus obtenu suivant le scrutin, des numéros déjà attribués à
d’autres petites listes. A Bruxelles, le FNB avait le 18 à l’Europe et le
17 à la Région Bruxelloise, malgré une demande de numéro identique, alors
que le 18 à la Région de Bruxelles-Capitale était dévolu à la liste FIRE. A
Namur, par contre, le FNB avait le 22 à la Région et le 18 à l’Europe!
Bravo pour la confusion ! Un membre du bureau électoral scandalisé nous a
dit que des directives en ce sens avaient été reçues : quand on lui a
demandé un écrit, il a répondu qu’il « ne fallait pas aller trop loin ! » Enfin,
lors du dernier scrutin régional bruxellois, dans le système informatique, une
« panne » a privé les petits partis (et uniquement eux) du logo
qu’ils avaient demandé. Les logos[1]
en grandes lettres de ces partis ont été remplacés par des sigles en lettres
tellement minuscules que la plupart des électeurs ne savaient pas les lire et
n’ont pas pu identifier les listes. Résultat : dans la circonscription
de Bruxelles, le FNB n’a recueilli que 2.656 voix, alors qu’il recueillait
dans les mêmes cantons électoraux et au même moment 4.915 voix à l’Europe
(le sigle apparaissait à l’écran pour le scrutin européen). Cerise
sur le gâteau, ce sont les assemblées élues qui valident leur propre élection.
Pas de recours devant une instance indépendante, mais devant les concurrents
des partis installés. Qui peut croire que des élus vont invalider leur élections
et retourner aux urnes, avec tous les frais et les risques que cela comporte ? La
liberté de réunion. Quand
on est un petit parti, inutile d’essayer d’obtenir une salle appartenant (ou
subventionnée) par les pouvoirs publics, cela est systématiquement refusé.
Difficile d’en obtenir auprès de particuliers, à moins que la réunion ne
soit tenue secrète: dès que le lieu est connu, le propriétaire ou le gérant
font l’objet de pressions des pouvoirs publics et s’ils persistent de
menaces anonymes d’attentats. Si la réunion n’est pas interdite, vu le
risque de trouble de l’ordre public, elle donne lieu à une
contre-manifestation qui dégénère systématiquement : jets de
projectiles, agressions physiques… Il faut bien constater qu’en Wallonie et
à Bruxelles, il n’y a de facto plus de liberté de réunion. Le
dernier congrès du FNB s’est donc tenu en Flandre, en 1998, dans un lieu tenu
secret jusqu’au dernier moment. Les militants ont malgré tout été suivis et
le lieu de réunion a été attaqué à coup de pavés et de cocktail Molotov,
devant une police qui a assisté passivement à ces délits.
La
liberté d’affichage Dans
la plupart des communes, il n’y a pas de panneau prévu pour coller des
affiches en faveur des partis non installés. Si vous avez le malheur de coller
un panneau attribué à un autre parti, votre affiche est immédiatement surcollée,
quand vous n’êtes pas l’objet d’une agression.
Dans d’autres communes, le collage d’affiche est un monopole communal :
vous devez apporter vos affiches au service administratif compétent, qui les
colle rarement, sinon jamais. Et si vous effectuez un collage sauvage, vous
faites l’objet de poursuites judiciaires ou de taxes administratives démesurées. On
pourrait multiplier le nombre de pages de petits obstacles, vexations, embûches…
Modifier
la législation électorale à quelques mois des élections n’est qu’un
aspect supplémentaire de ces multiples petites atteintes à la démocratie,
c’est pourtant en violation flagrante du Code
de bonne conduite en matière électorale élaboré par la Commission européenne
pour la démocratie par le droit instaurée au sein du Conseil de l’Europe, et
adopté à Venise les 18 et 19 octobre 2002, plus particulièrement l’article
2, b), du chapitre II de ce Code : « Les éléments fondamentaux du droit
électoral, et en particulier le système électoral proprement dit, la
composition des commissions électorales et le découpage des circonscriptions
ne devraient pas pouvoir être modifiés moins d’un an avant une élection, ou devraient
être traités au niveau constitutionnel ou à un niveau supérieur à celui de
la loi ordinaire.
» La Belgique a en effet violé ce code, puisqu’elle a modifié sa législation
électorale à quatre mois des dernières élections, en instaurant un seuil électoral
de 5% et en redécoupant les circonscriptions électorales. Le
FNB attaque par ailleurs ces dispositions devant la Cour d’Arbitrage…
sans trop d’espoir, parce que celle-ci a déjà refusé de suspendre
ces dispositions légales. Quand on vous dit qu’il n’y a plus de démocratie
en Belgique ! Est-ce
un motif pour ne rien faire et laisser tomber les bras ? Non, bien entendu :
ce serait laisser s’installer une dictature de plus en plus insupportable. Il
vaut mieux réagir tant que cela est encore possible : plus on tarde, plus
le prix à payer cela lourd pour rétablir les libertés.
(Bastion n°82 de septembre 2004) |