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VIVE
LES ELECTIONS
!
Monsieur Van De Lanotte nous sort à
grand fracas de tambours et de trompettes un projet (je souligne) de loi tendant
à « interdire les trains et les
gares aux voyous » (dixit la Dernière Heure la Première aux Ordres).
Fort bien, mais monsieur Van De Lanotte a été
ministre de l’Intérieur de 1993 à 1998, puis l’est à nouveau
depuis 2003. Il n’avait pas pensé à se pencher sur la question jusque là.
Et subitement, à la veille d’élections qui s’annoncent difficiles pour lui
et ses copains-coquins, le Saint-Esprit descend… Van de Lanotte prend des
mesures « réclamées depuis longtemps par la SNCB » (toujours selon
la DHPO) Tiens ! Tiens ! Il n’avait pas entendu auparavant ?
Aurait-il eu comme Chirac des problèmes de Sonotone ? Certaines
pratiques collectives, comme les élections, restaureraient-elles l’ouïe,
que certaines pratiques, celles-ci solitaires (dont le nom se termine aussi en
« tion »), mettraient, dit-on, à mal… ? L’ouïe va peut-être
mieux, mais la vue en prend pour son grade ! On reçoit ces
temps-ci tant de poudre aux yeux que l’on en est aveuglé ! Parce que ce
n’est que cela. En effet, que propose notre ministre
(ex-trotskiste, fiché alors comme dangereux par la Sûreté de l’Etat –
c’était du temps où cet organisme faisait son boulot qui est de défendre
l’Etat et non les profiteurs de celui-ci) ? Il voudrait interdire les gares et
les trains à ceux qui y ont commis une infraction,
de même que l’on peut interdire l’accès des stades de foot aux supporters
trop violents ou la fréquentation des cafés à ceux pour lesquels l’alcool
est mauvais conseiller. Si l’on suit la « logique » de notre
ministre, va-t-on interdire la STIB, les TEC et les De Lijn à qui y a fauté ?
Et, continuant dans cette bonne voie (sans jeu de mot), va-t-on défendre à
ceux qui y ont commis un vol à l’étalage d’entrer dans tout magasin
d’alimentation, voire, tout simplement, de manger et de boire ? Ou encore
sera-t-il interdit à ceux qui se sont rendus coupables d’une grivèlerie à
une pompe à essence de remplir le réservoir de leur véhicule ?
C’est absurde. D’abord parce
qu’une telle mesure serait en pratique inapplicable. Il faudrait mobiliser des
centaines, voire des milliers de policiers, et les poster à toutes les issues
de toutes les gares du pays pour
seulement demander leurs papiers à toute
personne voulant y pénétrer et vérifier sur un ordinateur si elle est autorisée
à le faire. Bonjour la pagaille ! Et puis, si l’on
peut vivre sans assister à un match de foot « live »
(d’ailleurs on peut toujours le regarder à la télé) ou sans mettre les
pieds dans un bistrot (d’ailleurs on peut picoler à la maison), il est
difficile, voire impossible pour ceux ne disposant pas d’un permis de
conduire, de se passer de transports en commun. Cela va même plus
loin, si l’on considère les choses d’un œil de juriste. Il ne s’agirait
plus d’une simple mesure de police, mais d’une véritable peine, puisque la
mesure porterait atteinte à la liberté fondamentale d’aller et venir, liberté
dont la privation est actuellement subie en prison. J’entends déjà grincer
les dents du Conseil d’Etat ou de la Cour d’Arbitrage. Appliquée sans
nuance, cette peine serait excessive, alors que personnalisée (comme doit l’être
toute peine dans un Etat de droit ), elle serait, d’une part, impossible à
mettre en œuvre, et, d’autre
part, ridiculement inefficace. En effet, s’agissant d’une peine, elle ne
pourrait être prononcée que par une juridiction. Or, nos tribunaux ne
parviennent déjà pas à faire face aux affaires dont ils sont saisis en vertu
du droit commun, et ce, malgré « l’écrémage » des dossiers
effectué, non seulement par les Parquets, mais dès les commissariats (bien des dossiers ne sont même
pas transmis aux Parquets par la Police, voir circulaire Dejemeppe). Va-t-on
saisir les tribunaux de simples tentatives de vol l’arraché ou de défaut de
paiement d’un titre de transport de cinq ou dix euros, quand des délits
autrement plus graves ne sortent même pas des commissariats ? En
d’autres termes, nous prend-on pour des imbéciles ? Mise en œuvre
judiciairement impossible, donc. Cette peine ne
pourrait n’être que temporaire, comme celles de prison. Que signifierait pour
un pickpocket trois mois, voire un an, d’interdiction de gare et de train ?
Il passerait outre (à moins de mobilisation policière sans précédent comme décrite
plus haut), ou se rabattrait sur d’autres terrains de chasse, comme le métro,
le bus, le tram, ou quelque autre lieu public… Encore heureux si ladite peine,
au demeurant prononcée un, deux, voire trois ans après les faits, n’est pas
assortie du sursis ! Inefficacité ridicule, donc ! C’est le type même de la mesure liberticide,
mais totalement utopique quant à
son efficacité pratique, comme les affectionnent ceux qui sont censés nous
gouverner, lesquels, dans l’affolement et dans l’urgence, sont prêts à faire et à dire
n’importe quoi dans l’espoir que cela leur permettra de sauvegarder la seule
chose importante à leurs yeux,
leur survie politique (et alimentaire). Totalement coupés de la réalité et
privés de tout sens pratique, ils n’ont d’autres références qu’une idéologie
nébuleuse, et, c’est la raison pour laquelle ils ne peuvent nous donner que
des propositions aussi affligeantes que celle que nous sert Van De Lanotte. Qu’elle soit avancée à
la veille d’un scrutin démontre seulement : 1) Que nos ministres sont parfaitement au
courant de la situation ; 2) Qu’ils s’en fichent éperdument entre
deux élections ; 3) Qu’ils sont prêts à
proposer m’importe quoi pourvu que cela brille assez pour jouer les miroirs
aux alouettes. Vive donc les élections qui nous permettent de démasquer ces cyniques incompétents.
(Bastion n°81 de mai 2004) |