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L’Espagne dans tous ses éclats

par Charles Magne

 

Chers et fidèles lecteurs, l’actualité vient de nous rappeler que l’histoire des peuples se forge aussi dans le sang et dans les larmes. Pourtant, il semblerait que le 11 mars 2004 ne sera pas le 11 septembre des Européens. En effet, si les attentats du World Trade Center ont mené à la mobilisation de l’imperium américain, il semblerait que tout soit entrepris, en Europe, pour endormir le corps social et empêcher toute réaction jugée politiquement incorrecte. Il faut dire que les bombes déposées par les islamistes dans les trains madrilènes sont autant de pierres jetées dans le jardin des islamophiles adeptes de la société multi-multi. C’est bien là que le bât blesse. Les faits viennent de plus en plus invalider l’idéologie mortifère de la caste dominante européenne. Aussi, on comprend qu’elle mobilise tous les moyens en sa possession pour chloroformer l’esprit de ses gouvernés.

Pour bien saisir ce qui s’est passé, il faut revenir sur la manière dont le quadruple attentat a été traité par les médias et le politique. Pour cela, je ferai appel à mon expérience personnelle, laquelle montre qu’un homme averti ne se laisse pas facilement duper. Lorsque la nouvelle a été diffusée, j’étais dans ma voiture comme des milliers d’autres navetteurs, coincé dans l’un de ses innombrables embouteillages organisés par les écolo-gauchistes de la région bruxelloise. Il devait être un bon huit heures du matin.

A ce moment, on annonçait que plusieurs explosions s’étaient produites dans des trains à l’approche de la gare centrale de Madrid. Un premier bilan faisait état de huit morts. D’emblée, les journalistes accusaient l’organisation séparatiste basque ETA du forfait. Bien que n’étant pas un spécialiste du terrorisme, je trouvai leur empressement à désigner les coupables un tantinet suspect. Comment, en l’absence de tout élément d’enquête, pouvait-on déjà parvenir à cette conclusion ? En outre, je croyais me souvenir que l’ETA pratiquait un terrorisme plus sélectif, visant principalement des cibles symboliques : élus, journalistes, policiers, magistrats. Ce qui me frappa aussi c’était la parfaite synchronisation de l’action rappelant étrangement un certain 11 septembre 2001. Incidemment, il m’était difficile de croire que plusieurs explosions simultanées avaient fait aussi peu de victimes.

Arrivé au bureau sur le coup des 10 heures, je trouvais mon assistante en émoi. Celle-ci me déclara tout de go : « Vous avez-vu, nous sommes le 11 mars. Ils ont refait le coup du 11septembre. Ce n’est pas un hasard. C’est la guerre ! ». Animé par quelques doutes, j’envoyai mon premier courriel à un de nos éminents membres du FNB lui indiquant que j’envisageais la possibilité d’un attentat islamiste. Mon correspondant, avec la sagacité qui le caractérise me répondit sur-le-champ : « C’est simple. Si c’est l’ETA, le parti populaire espagnol remporte les élections de dimanche. Si c’est Al-Qaïda ce sont les socialistes. On apprendra lundi que c’était Al-Qaïda. »

Ainsi, en moins de deux heures mon correspondant, mon assistante et moi avons été capables d’entrevoir une réalité, qu’il a fallu plus de soixante-douze heures aux médias pour mettre à jour. La question est alors de savoir pourquoi  ? Certes, lesdits médias ont, aujourd’hui, beau jeu de prétendre qu’ils ont été trompés par les mensonges du gouvernement Aznar. Mais c’est pour mieux dissimuler ce qui s’est véritablement passé dans les coulisses de la médiacratie. Car, il ne faut pas s’y tromper l’apparent aveuglement du gouvernement espagnol et des médias n’étaient pas fortuits. Ils répondaient à un véritable plan de chloroformisation générale des esprits.

            La première phase de l’anesthésie générale a été réalisée en Espagne. Elle a été administrée par le très contesté ministre de l'intérieur Angel Acebes. Elle a consisté à distiller le nombre de morts au compte-gouttes, sans jamais donner de prévisions de ce que pourrait être le décompte final des victimes. Or, il est bien connu que l’intensité de la réaction psychologique des individus dépend de la première information perçue et qu’elle est faiblement corrigée par les informations suivantes. Par conséquent, il est possible de limiter l’émotion publique en révélant progressivement l’ampleur d’une catastrophe, au lieu de la présenter d’emblée pour ce qu’elle est ou sera.

Sans entrer dans une comptabilité macabre, il faut relever que le bilan officiel des attentats est passé de 8 victimes à 190 entre 9 heures du matin et 19 heures, selon une courbe parfaitement régulière, comme si elle avait été dessinée par un ordinateur. Il a donc fallu dix heures aux autorités espagnoles pour se rendre compte de ce qui s’est vraiment passé. Cela est difficile à croire. Même si l’on peut admettre que le bilan progressif ait été donné au fur et à mesure de la collecte d’informations. Ce qui est surprenant, ici, c’est qu’à aucun moment les médias qui font l’opinion en Europe n’ont cherché à savoir qu’elle était la véritable portée des attentats.

Seul le journal madrilène ABC a avancé des bilans plus élevés que ses confrères, mais là encore ils n’ont pas été repris par les grands médias. Pourquoi ? Sans-doute, parce que leurs rédactions supputaient déjà que l’ETA n’était pas le vrai coupable. Ils avaient pour cela plusieurs indices en leur possession. Outre le mode opératoire des attentats, ils savaient que les réseaux islamistes implantés en Espagne étaient en pleine effervescence et préparaient une attaque d’envergure. Surtout, leurs analystes pouvaient facilement établir une analogie avec l’attentat du 12 avril 1985, commis par d’autres islamistes toujours à Madrid et qui fit 18 morts. Or, c’est extrêmement curieux, nul ne s’est avisé dans la sphère médiatique de faire publiquement ce rapprochement. Là aussi, pourquoi ?

Ce qu’on peut en déduire de tout ceci, c’est que très tôt les experts des médias sont parvenus à la conclusion que les bombes sentaient le soufre islamiste. Que cela était politiquement indésirable. Aussi, les médias ont-ils provisoirement, laissé l’équipe Aznar s’enferrer dans ses manipulations électoralistes, faisant de la sorte un coup-double : éviter une montée d’islamophobie et déstabiliser l’un des rares gouvernements européens dit de ‘’droite’’. C’est pour cela qu’ils ont suivi à la lettre la méthode d’annonce progressive des victimes imprimée par Angel Acebes.

Que tout ceci ait été volontaire de la part des cercles bien informés fait peu de doute. Un élément vient, dans tous les cas, confirmer l’hypothèse de la rétention d’informations sur l’ampleur de la catastrophe. Il s’agit de la déclaration du très islamophile Pat Cox[1]. Celui-ci a dit que cet attentat était « le pire acte terroriste jamais commis sur le territoire de l’Union Européenne ». Cependant, à cette heure-là – il était précisément 11H20 du matin - le bilan officiel du ministère de l’intérieur espagnol n’était que de 60 morts. Or, l’attentat perpétré, en 1980, contre la gare de Bologne avait fait 85 victimes. Il apparaîtrait donc que M. Cox a eu accès à des informations que l’on n’a pas jugé bon de donner au bas-peuple. Ou alors, il a parlé en non-connaissance de cause. Ce qui surprendrait de la part de ce politicien singulièrement matois.

La seconde étape de la chloroformisation des esprits s’est précisément jouée à l’échelon européen. Elle a consisté en une véritable désincarnation de l’ennemi, assise sur une série d’interventions politiques concentrée dans un laps de temps remarquablement court  - 45 minutes – de manière à frapper les opinions publiques. Ainsi, à tout seigneur tout honneur, le bal de l’autruche a-t-il été ouvert à 11H15 par Ben Chirac en personne suivi par le déjà-nommé Cox (11H20), puis Fischer (11H22), Raffarin (11H30), Verhofstadt (11H35), Sampaio[2] (11H40), Solana (11H50), Cowen[3] (11H55)… Comme par enchantement, toutes ces interventions ont délivré les mêmes messages lénifiants. Le premier d’entre eux était que l’attentat n’avait pas été commis contre le peuple espagnol mais contre l’Union européenne elle-même. Cette idée généreuse en apparence était, en vérité, un expédient subversif destiné à altérer les schémas mentaux des Espagnols et des Européens. En transférant l’objectif des attentats sur l’Europe institutionnelle, on cherchait à réduire l’intensité des réactions liées à la prise de conscience d’une agression contre un territoire réel. Qui voudrait, en effet, défendre une chimère technocratique ? Ainsi a-t-on cherché à retirer, de la conscience collective des Européens, l’image même de la patrie en danger qui s’impose naturellement dans ce genre de circonstances. 

Le deuxième message asséné était qu’il fallait manifester – si possible immédiatement – son opposition au terrorisme. Et non pas, notez-le bien contre les terroristes. Cet appel était une seconde astuce pour désincarner la réalité, pour offrir une occasion à ceux qui pourraient être révoltés par la boucherie islamiste de se défouler sans risque d’appels à la vengeance – puisque les vrais coupables n’étaient pas encore connus. Faute d’ennemis donc, quelques milliers de manifestants hagards ont défilé, ici et là dans l’après-midi du 11 mars, en criant ‘’Paix, Paix, Paix’’, un peu comme le feraient des moutons (Bêê ! Bêê ! Bêê !) un lendemain de Haït el Qebir, ravis de constater qu’ils ont échappé à la baignoire.

Le troisième message assené avec force par nos élites islamophiles – même après que les coupables furent identifiés – était que les attentats constituaient des actes de barbarie inexplicables. Or, si les attentats étaient bien de la sauvagerie, leur but et leur motif sont parfaitement explicables. Leur dessein était de tuer le plus grand nombre de personnes possible et leur motivation n’était autre que la haine dictée par la prétendue religion d’amour et de paix.

Le quatrième message répété par la conjuration des bien-culpabilisants a été que les attentats témoignaient d’un défaut de coordination, entre les pays européens, dans la lutte contre le terrorisme. Message accompagné de la promesse qu’on allait bientôt faire quelque chose… C’est ce qui a donné lieu à la création du burlesque poste de ‘’Monsieur terrorisme’’ et à la nomination du super-technocrate Gijs de Vries dont plusieurs journalistes officiels se sont, quand même, demandés s’il parviendrait à terroriser les terroristes ? Il est vrai que le brave homme n’a pas franchement l’air d’un foudre de guerre…

Ainsi, pour résumer la pensée officielle, les attentats de Madrid n’ont pas été commis par des terroristes mais par le terrorisme, n’ont pas visé des êtres de chair et de sang mais des institutions, et fin du fin : ils étaient sans mobile. Autrement dit : circulez braves gens y a rien à voir. Ni les monceaux de cadavres, ni la vingtaine de Maghrébins arrêtés aux quatre coins de l’Europe. On ne peut qu’être frappé par le contraste de ce discours avec celui de Bush Imperator juste après les attentats du 11 septembre. Au moins, celui-ci avait promis au peuple américain, de dénicher les terroristes et de les chasser comme des rats. Ce qu’il fit en Afghanistan avec un certain succès quoi qu’on en pense. Pour être complet sur ce sujet, il faut revenir, un instant, sur le double-jeu des médias dans la relation des événements. Certes, ils ont diffusé quelques rares informations laissant entendre qu’il pouvait y avoir une autre piste que celle de l’ETA, mais ils ont surtout tenté de prolonger le doute quant aux auteurs de l’attentat, au-delà même des évidences. Qu’on en juge par ces quelques perles de la pensée islamophile unique collectées au hasard des ondes d’Europe 1 et de la RTBF :

11 mars, 13H20, la formation interdite Batasuna - bras politique de l’ETA - nie la participation de l’organisation basque dans les attentats. Réaction des journalistes : c’est certainement un mensonge visant à éviter le discrédit de l’ETA. 20H30 Une camionnette volée est retrouvée près de Madrid au point de départ des trains visés par les attentats. A l’intérieur on découvre des versets du coran en arabe et sept détonateurs. Commentaire d’Europe 1 qui omet de préciser la présence des détonateurs : On a trouvé des versets du coran dans une camionnette volée près du départ des trains ? Et alors ? Cela ne signifie rien, d’autant plus que ces versets ne contenaient aucun message agressif  - sic ! 21h25. Un communiqué envoyé au quotidien Al Qods al Arabi, publié à Dubaï, revendique les attentats commis à Madrid au nom de Al-Qaïda. Immédiatement l'authenticité du texte est mise en cause. Les journalistes soutiennent qu’il s’agit d’une revendication fantaisiste. Ainsi : lorsque l’ETA nie sa participation, elle ment. Lorsque Al-Qaïda revendique la sienne, elle ment aussi, car il est entendu qu’il ne peut y avoir qu’une seule vérité conforme à l’islamophilie régnante.

12 mars. Journal de 7 heures. Europe 1. On revient sur l’affaire des versets avec ce commentaire hallucinant : Une cassette avec des versets du Coran a été retrouvée dans une camionnette volée au départ des trains. Il n’y a rien à cela d’anormal. Des détonateurs auraient été retrouvés dans cette camionnette. Cela est un peu moins normal – re-sic ! Editions de la mi-journée : un téléphone portable qui servait de mécanisme de mise à feu est retrouvé intact et configuré en arabe. Commentaire : il peut s’agir d’indices volontairement abandonnés par ETA pour brouiller les pistes.  14 mars : Une cassette a été abandonnée près de la mosquée de Madrid revendiquant l’attentat au nom d’Al-Qaïda. Un homme à l’accent marocain y déclame le texte suivant (non diffusé par les grands médias) : Nous déclarons notre responsabilité pour ce qui est arrivé à Madrid… C'est en réponse aux crimes que vous avez commis dans le monde et concrètement, en Irak et en Afghanistan, et il y en aura davantage si Dieu le veut. Vous, vous voulez la vie, et nous nous voulons la mort, ce qui donne un exemple de ce qu'a dit le prophète Mahommet, si vous n'arrêtez pas vos injustices, le sang coulera davantage, et ces attentats sont très peu en comparaison avec ce qui pourra arriver avec ce que vous appelez le terrorisme.»

Devant cette preuve, on aurait pu penser que les médias allaient plier. Mais que nenni, il fallait coûte que coûte continuer à instiller le doute pour éviter l’incarnation de l’ennemi. Aussi, une nouvelle parade a t-elle été trouvée par Europe 1. On a pu y entendre Dominique Souchier déclarer dimanche matin :  On ne peut exclure qu’Al-Qaïda tente de récupérer un attentat commis par ETA à des fins opportunistes. Une pensée de haute-magie, volontiers reprise sur les ondes de la RTBF jusque dans la soirée du 15 mars. 

Comment ensuite s’étonner que les manifestants de Madrid aient désigné Aznar comme l’auteur des attentats et non les islamistes ? Que l’électorat espagnol se soit couché devant les terroristes ? En ces temps de confusion, tout devient possible. Alors, je ne serai pas surpris d’apprendre, bientôt, que derrière ces attentats, il n’y avait pas de réseaux (islamistes). Que tout cela était l’œuvre d’individus isolés. Et pour paraphraser la première en vices Laurette : que la tâche de la justice espagnole sera de ramener la paix dans les esprits et de donner une seconde chance aux terroristes. Mais que mon lectorat se rassure, je n’en croirai pas un traître-mot.


Charles Magne



[1] Président du parlement européen et forcené partisan de l’adhésion de la Turquie à l’Union.

[2] Président du Portugal.

[3] Ministre irlandais des affaires étrangères.

 

 

(Bastion n°80 d'avril 2004)

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