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LA SORDIDE AFFAIRE DUTROUX

 

L’affaire Dutroux fait la une des médias depuis plusieurs semaines. A en avoir la nausée. Il ne nous était cependant pas possible de faire l’impasse sur ce dossier. Nous ne commenterons pas l’actualité quotidienne du procès. Ce n’est pas l’objectif d’un mensuel, qui est forcément toujours en décalage avec l’actualité.

Le comportement de Dutroux à son procès est révélatif du personnage. Ce manipulateur prend indiscutablement plaisir à être la vedette des médias et à l’avant-scène de l’actualité. Nous ne nous attarderons donc pas sur la personnalité de ce détraqué.

Par contre, il est permis de s’interroger à son sujet. Comment est-il possible qu’un marginal dans son genre soit propriétaire de quatre maisons et de plusieurs véhicules. Comment disposait-il d’assez d’argent pour boursicoter? Comment se fait-il qu’il dispose de comptes au Luxembourg, sur lesquels on aurait relevé des mouvements récents de l’ordre de 100.000 € ? Pourquoi bénéficiait-il d’une pension mensuelle de 2.000 € suite au traumatisme psychologique causé par son précédent séjour en prison? Comment ne s’est-on pas interrogé plus tôt sur les rentrées financières de ce marginal?

Comment peut-on accorder quelque crédit à Nihoul? Il n’y a certes pas de preuves contre lui, mais il y a beaucoup trop de coïncidences troublantes. C’est un escroc, prêt à faire de l’argent n’importe comment et avec n’importe quoi. Partouzeur, il fréquente les obsédés du sexe des milieux huppés. Bruxellois, il met en réparation chez un non-garagiste de Charleroi une Audi 80, qui ne lui appartient pas. Comme par hasard, cela lui sert de justification pour expliquer des dizaines de coups de téléphone avec Dutroux à un moment crucial… De plus, il change cinq fois d’alibi. Il offre 1000 pilules d’Extasy à Lelièvre, le lendemain de l’enlèvement, et affirme que la drogue lui a été laissée par un gendarme opportunément décédé. Franchement, tout cela ne tient pas debout.

Quant au juge d’instruction Langlois, c’est un politicien en toge, qui a réalisé dans cette affaire sa première instruction. On a opportunément écarté le juge Jean-Marc Connerotte, qui, expérimenté, avait déjà mis à jour tout ce que l’on sait aujourd’hui. Langlois n’a rien découvert. Mais Langlois a refusé d’explorer certaines pistes. Il a refusé certains devoirs élémentaires que la logique exigeait. Cela apparaît clairement aujourd’hui. Pourquoi a-t-il agi ainsi?

Une bonne part de la presse a critiqué le côté brouillon de Connerotte et encensé le côté méthodique de Langlois. Mais, la suite du procès a démontré qu’il n’en était rien. Pourquoi une certaine presse s’acharne-t-elle à mettre à néant la thèse des réseaux, souvent par des attaques ad hominem contre les défenseurs de cette version?

Où sont passées les cassettes vidéo trouvées chez Dutroux? Pourquoi ne pas les avoir toutes visionnées? Pourquoi ne pas avoir procédé immédiatement aux analyses de cheveux et des empreintes génétiques? Pourquoi avoir écarté d’office certains témoins? Pourquoi avoir refusé certaines reconstitutions?

Ce ne sont plus des dysfonctionnements d’une enquête. Ce sont des fautes graves qui jettent le doute sur tout ce procès et rendent d’avance le verdict – quel qu’il soit – suspect.

Il est vrai que Laurette Onkelinx a osé dire que ce qu’elle attendait de ce procès, c’était la paix des esprits. Il n’y aura pas de paix des esprits tant qu’on ne connaîtra pas la vérité, madame le Ministre ! Et on ne connaîtra sans doute jamais la Vérité.

Elle a osé ajouter qu’il fallait laisser une seconde chance à Dutroux ! Comment est-ce possible de proférer de telles inepties? Dutroux a déjà eu une seconde chance: il a été condamné à treize ans pour viol et a été relâché par Melchior Wathelet après un peu plus de trois ans ! C’est parce qu’il a eu une seconde chance – sinon une Xième chance – qu’il a pu tuer Julie, Mélissa, An et Eefje. Qu’il a enlevé Sabine et Laetitia et les a violées, en plus de trois jeunes slovaques.

Tirera-t-on les leçons de cette sordide affaire? Il est à craindre que non. Et la confiance des Belges en leurs institutions sera encore moindre qu’avant. Les réformes initiées depuis la marche blanche – réforme des polices, réforme de la Justice – sont des échecs patents. Les politiciens disent avoir compris, mais ils n’ont strictement rien compris. Veulent-ils seulement comprendre?

Pourquoi les Belges continuent-ils à voter pour ceux qui ont fait la preuve de leur incompétence, voire de leur mauvaise foi? Jusqu’où faudra-t-il plonger pour que les Belges, enfin, réagissent?

 

 

François-Xavier ROBERT

Licencié en Sociologie, Science Politique et en Droit

Ancien Officier supérieur para-commando

Secrétaire général du FNB

 

 

(Bastion n°80 d'avril 2004)

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