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Les quatre piliers de la civilisation (Deuxième pilier, la démocratie) Par
Charles Magne Le
mois dernier, nous avons vu comment l’homogénéité ethnique conditionnait
l’émergence du phénomène civilisationnel. Toutefois, ce constat n’est pas
propre à la civilisation européenne. Il vaut en tout temps et en tout lieu. Ce
qui apparaît, par contre, comme une caractéristique spécifique de la
civilisation européenne c’est la démocratie. Elle en est la réalisation
politique la plus achevée. Pour prendre une analogie, la démocratie est à la
civilisation européenne ce que l’intelligence est à l’humanité. Si on
privait l’être humain de sa faculté de discernement, on le ramènerait à un
stade inférieur de son évolution biologique. De la même manière, si l’on
abolissait l’Etat de droit en Europe, nos institutions régresseraient au
stade de l’orientalisme politique. Pour
comprendre le rapport intime entre la démocratie et le génie européen, nous
suivrons volontiers E.-J. Chevalier lorsqu’il écrit dans L’âme Grecque
: « Le
rayon de lumière venu de la Grèce antique n’est pas le seul, sans doute, qui
éclaire l’époque contemporaine mais, sans lui, la civilisation et la
conscience européennes qui touchent aujourd’hui à leur paroxysme ne seraient
pas pleinement intelligibles. » Il
nous faut, donc, remonter à la Cité grecque et au Ve siècle avant
J.C. pour saisir les véritables principes de la démocratie. C’est,
d’ailleurs, à Périclès que l’on en doit la première définition la plus
complète. Dans une oraison funèbre aux guerriers morts lors de la première
guerre du Péloponnèse, Périclès (-492, - env. 429) défend les institutions
d’Athènes comme autant de raisons valables de sacrifier sa vie. Dès
le début de son discours, il met en lumière deux principes fondamentaux de la
démocratie : l’isonomie - ou l’égalité devant loi
- et l’iségorie, la liberté d’opinion. Ces deux
principes sont au cœur du régime démocratique qui est un régime d’égalité
et de légalité. Encore faut-il s’entendre sur ces deux concepts. Pour
Périclès et ses contemporains, l’égalité des individus n’est pas l’égalité
sociale. Elle est l’égalité devant la loi. Dans un langage plus moderne,
on dirait que l’égalité en démocratie est l’égalité procédurale. Il
est frappant de voir que telle était, précisément, la pensée de Périclès :
« A
leur égard [celui des lois], tous les Athéniens sont égaux… égaux dans la
solution des différends entre particuliers, égaux dans l’obtention des
honneurs qui sont dus aux mérites et non pas à la classe. »
Selon
les critères définis par Périclés, on est forcé d’admettre que le régime
politique actuel de la Belgique n’est plus une démocratie. L’obsession
égalitariste y a remplacé l’égalité de procédure. Et, les
emplois publics n’y sont plus pourvus selon le mérite personnel mais en
fonction du seul conformisme idéologique. Quant
à la légalité dudit régime, elle n’est plus assurée car les lois y
sont trop nombreuses. Or, pour que des citoyens de conditions sociales différentes
puissent accéder en toute équité à la connaissance des lois, il faut que
leur nombre soit réduit au strict minimum. Dans le cas contraire, les citoyens
vivent dans leur ignorance et sont soumis à l’arbitraire juridique le plus
total. Dans
la pensée grecque, un nombre réduit de lois ne signifie pas pour autant l’anomie
(l’absence de règles) ou l’absence de pouvoir (l’anarchie). Périclès le
rappelle, il existe d’autres moyens pour régir les relations entre les
individus : « Les
lois sont de deux ordres… les lois écrites et les lois non-écrites
qui sont le résultat d’une convention générale et qui ne peuvent être
enfreintes sans honte ». Ceci
signifie que la véritable démocratie est indissociable d’une morale
collective forte, mais librement établie par les citoyens. Or, on le notera,
notre régime politique encourage les citoyens à violer les lois non-écrites
par la subversion des valeurs collectives traditionnelles. Cela n’est pas
innocent et répond à une volonté délibérée de substituer la sphère
publique – sur laquelle règne sans partage l’élite au pouvoir – à la
sphère privée. Ce qui est un autre moyen d’abolir la démocratie. Ces
dérives ne sont pas nouvelles. Elles ont été parfaitement décrites par
Aristote (-385, -322) dans ses analyses sur l’évolution des régimes
politiques. Marcel Prélot en donne, dans son
Histoire des idées politiques, un résumé saisissant : « La démagogie
abolit le règne des lois. Elle remplace les dispositions générales,
impersonnelles et objectives valables pour tous par des décisions individuelles
et subjectives, frappant certains individus ou certaines catégories
d’individus, notamment les riches. Les démagogues, pour substituer la
souveraineté des décrets à celle des lois, font attribuer toutes les affaires
au peuple ; car leur propre puissance ne peut qu’y gagner. Ils ont
l’air de laisser à la foule la décision ; mais en réalité ayant capté
la confiance de la multitude ce sont eux qui gouvernent sous le couvert de la
volonté populaire. D’un autre côté, tous ceux qui estiment avoir à se
plaindre de [la loi] ne manquent pas d’appeler au jugement exclusif du peuple.
Celui-ci accueille volontiers la requête. On aboutit ainsi à la confusion des
pouvoirs et à l’anéantissement des distinctions constitutionnelles. » L’actualité
est riche d’exemples illustrant ce genre de dérives. Ainsi, récemment, le
meurtre de la gauchiste Marie Trintignant par l’ultra-gauchiste Bertrand
Cantat (il y a toujours plus gauchiste que soi) a donné lieu à toute une
campagne médiatique de mise en condition de l’opinion publique ouest-européenne
dans le but de soustraire l’énergumène aux rigueurs de la justice
lithuanienne. Lors de cette campagne, le meurtrier a été systématiquement décrit
dans des termes positifs. Son crime a été transformé en simple « affaire »
- l’affaire Trintignant-Cantat. Rapidement la RTBF, RTL, TF1 se sont étendus
sur la personnalité du meurtrier en disant qu’il était un « homme
sensible, trop sensible pour qu’on lui révèle le décès de sa
compagne… pour lequel il demandait pardon à la famille … » Dans
un style purement orwellien, Europe 1 (Journal du matin des 13/08 et 25/08) a même
déclaré que l’actrice était morte à la suite de « secousses »
(alors qu’on savait depuis plusieurs jours, déjà, qu’elle avait
succombé aux innombrables coups portés à la tête par la brute Cantat) et que
« chaque femme qui entrait dans la vie de Cantat rentrait dans la lumière »
(éternelle ?). Rétrospectivement,
on voit bien que cette opération d’agit-prop était inspirée par l’esprit
de la démagogie décrit par Prélot : empêcher une disposition générale
et objective de s’appliquer (la loi punissant le meurtre) pour lui substituer
une disposition individuelle (l’absolution idéologique). Car fondamentalement
Cantat est perçu par la caste médiatico-politique comme un des siens. C’est-à-dire,
comme un individu au-dessus du sort commun et des lois. Cette manière de
penser, n’est pas seulement un déni de justice, c’est un déni de démocratie.
Pouvons-nous,
pour autant, qualifier le régime politique actuel de la Belgique de pure Démagogie
? Certes les démagogues n’y manquent pas. Mais, il ne semble pas que cela
soit une raison suffisante pour le classer dans ce genre. En effet, pour
Aristote, la démagogie est une dérive de la démocratie. Or, pour tous les
auteurs Grecs classiques, la démocratie implique que les dirigeants du
peuple soient tirés au sort. Dès
qu’il y a élection, on est dans un système oligarchique. C’est donc vers l’oligarchie qu’il faut tourner
notre regard pour comprendre la nature du régime dans lequel nous vivons.
L’oligarchie présente, elle-même, plusieurs formes. L’une d’entre-elles
correspond, trait pour trait, à notre système politique - qui combine d’une
part l’élection et d’autre part la nomination de père en fils des
ministres et des députés -, il s’agit de la polytyrannie. Pour
Aristote, la polytyrannie se manifeste dès lors que le pouvoir se
concentre dans quelques mains et que ce pouvoir se transmet héréditairement.
Les oligarques héréditaires se comportent, alors, comme un tyran collectif
(de là l’expression polytyrannie). Aristote ajoute que : «ce
régime unit au principe de l’hérédité celui de l’arbitraire des
magistrats substitués au règne de la Loi. »
Logiquement,
les polytyrans combattent la liberté d’opinion – l’iségorie qui
menace – par le biais des élections - leur situation et celle de leurs
descendants. Pour cette raison, on ne compte plus, aujourd’hui, les lois qui rétablissent
le délit d’opinion et restreignent la concurrence politique. Mais
les polytyrans actuels visent au-delà de la simple répression des opinions.
Ils essayent de tuer, dans l’œuf, tout esprit critique afin d’interdire au
Citoyen l’accès à la connaissance de la chose publique. Pour cela ils
utilisent plusieurs techniques éprouvées : le nivellement de
l’enseignement par le bas, la diffusion d’une sous-culture
avilissante et la terreur indirecte – par l’insécurité – qui
force les citoyens au « cocooning », au repli sur leur sphère
privée. Une sphère privée que l’on érige, par l’intermédiaire des médias,
en objet de débat public (Talk et Reality-shows). De la sorte, nos polytyrans
transforment les citoyens libres en esclaves ludiques, impropres au maintien de
la démocratie. A ce propos, Périclès a une formule limpide : « Nous sommes les seuls à considérer
l’individu étranger aux affaires publiques, non comme un être de loisir,
mais comme un être inutile. »
La dérive vers la polytyrannie établie, il nous reste à voir de quelle
manière elle menace notre civilisation. Pour cela, il nous faut revenir aux
liens décrits, dans la chronique du mois précédent, entre l’évolution génétique
des peuples et la forme de leur langage. Selon
cette logique, ce n’est pas un hasard si la démocratie est découverte par un
des peuples indo-européens (les Doriens) au moment où il développe de
nouveaux concepts philosophiques, mathématiques, physiques, esthétiques et
architecturaux. Autrement dit, la démocratie est le fruit d’une aptitude
ethno-culturelle spécifique à la rationalité sociale et scientifique. En
ce sens, elle n’est pas aussi universelle qu’on l’affirme généralement.
La preuve en est que, depuis les 2500 années où elle a été découverte, elle
n’a été adoptée que par minorité une d’Etats dont 99% sont
d’origine indo-européenne -
L’Inde et l’Amérique du sud comprises. Ce
constat complète l’observation d’Aristote selon laquelle, il n’est pas de
démocratie sans homogénéité ethnique. Il le complète, en effet, car il
indique que l’homogénéité ethnique n’est pas seulement une condition
de la démocratie mais sa cause. Une leçon que l’omar Michel et consorts
ont bien comprise, puisqu’ils ouvrent nos frontières à la planète
afro-musulmane dans l’espoir que l’immigration brisera le germen de la démocratie.
Ce faisant, nos polytyrans briseront le second ressort de notre civilisation,
comme leurs sinistres devanciers ruinèrent Rome en abattant un à un à un les
fondements de la République romaine. Le
mois prochain nous verrons comment leur entreprise de démolition systématique
s’étend, déjà, à l’avant-dernier pilier de notre civilisation :
l’esprit de science.
(Bastion n°74 d'octobre 2003) |