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Médecins généralistes indépendants:

RACE en voie de disparition

 

De toute évidence, un projet se dessine à moyen terme : une médecine gérée par les instances politiques avec des préoccupations essentiellement économiques au mépris de la santé individuelle, une médecine dont les acteurs seront étroitement contrôlés et dirigés par les pouvoirs politiques.

Les mutuelles créent des « maisons médicales » où travaillent des généralistes aux salaires dérisoires, des infirmières, kinés, et psychologues et même des esthéticiennes (!), Il s’agit de véritables petites entreprises visant la rentabilité. Elles fonctionnent de façon déloyale : l’élémentaire règle de déontologie qui oblige à percevoir un ticket modérateur n’y est pas respectée. Notons l’exemple de la plainte pour concurrence déloyale déposée par le docteur Annet, représenté par maître Luc Misson, à l’encontre d’une maison médicale prévue à Marche-en-Famenne.

D’autre part, la Communauté française tente, sans grand succès vu l’incompétence des structures, d’organiser des services de dépistage du cancer, en particulier le dépistage du cancer du sein. Une publicité à grands frais informe les femmes de cette campagne alors que les services de dépistage ne sont pas encore mis en place. Entre la réalisation de la mammographie et la communication au médecin traitant ou au gynécologue d’un résultat pathologique, trois semaines s’écouleront, alors que dans un centre classique, mammographie, échographie, ponction de la lésion suspecte sont effectués en un seul jour. On tente donc de remplacer une médecine efficace par des structures anonymes, incompétentes, mais organisées par l’Etat.

A propos du diabète, de vastes campagnes de dépistage sont également mises sur pied. Lorsque le diagnostic sera posé, les infirmières à domicile seront dorénavant formées pour suivre le patient et adapter le traitement. Quand apprendra-t-on aux infirmières à surveiller la tension artérielle et modifier les traitements en conséquence ?

Au chapitre des vaccinations, lorsqu’un médecin commande les vaccins prévus suivant les schémas conseillés, on lui demande s’il est généraliste ou médecin d’un centre ONE. Les médecins des centres sont servis prioritairement, de plus administration de vaccins dans ces centres est gratuite pour le patient (mais bien entendu pas pour la collectivité). N’est-ce pas une discrimination inacceptable qui démontre clairement les intentions de ceux qui nous gouvernent ?

Mainmise sur les soins palliatifs.

Un médecin traitant connaît son patient depuis longtemps, parfois depuis l’enfance. Il l’a vu grandir, devenir adulte, il l’a suivi dans son évolution, dans ses joies, dans ses difficultés, il lui a annoncé une maladie grave, l’a accompagné dans son traitement et voilà qu’en fin de vie, alors qu’il est le mieux à même de gérer les soins palliatifs, les instances prétendument supérieures ont jugé plus adéquat de créer des équipes dont le médecin est quelque peu exclu. Là, des infirmières et d’autres médecins inconnus, organiseront les soins de fin de vie. Pourquoi ?

Il est actuellement question de créer des plates-formes de psychiatrie. La médecine générale, dans la connaissance qu’elle a des patients est à même de gérer les problèmes psychologiques courants. Le travail d’un généraliste est constitué, à mon avis, pour plus de 50% de problèmes psychosomatiques.

Alors, que reste-il au généraliste ?

-L’administration des dossiers. L’INAMI a créé le dossier médical global en agitant bien sûr la petite carotte habituelle (12,5 € par an et par dossier), de quoi motiver les médecins les plus 

nécessiteux. En échange, les patients seront « regroupés » par rapport à un médecin : une étape de plus vers le fonctionnariat. Enfin et surtout les dossiers devront correspondre à un modèle imposé et seront susceptibles d’être contrôlés.

-La rédaction de demandes de remboursement « Bf ». Aberrant !

Le médecin qui a suivi 7 ans, ou plus, de cours universitaires, qui connaît son patient, sa maladie, ses antécédants, ses allergies… se voit imposer de demander à un médecin conseil, ou plus précisément à sa secrétaire, l’autorisation de remboursement du médicament qu’il prescrit. Dans le but de faire des économies ? Combien coûte un médecin conseil et son staff de secrétaires ? De toutes façons, si on se montre obéissant, si on se plie à la règle et aux exigences administratives, on obtient le remboursement. Où est l’économie ? Ici encore, seule la possibilité de contrôle compte, possibilité de contrôle et donc de pressions.

-Les gardes.

Madame Aelvoet a imaginé un nouveau système de garde, alors qu’il en existait un, adapté suivant les régions, selon les utilités. Les médecins organisaient leurs gardes. Maintenant, Madame Aelvoet dirigera la garde.

-Le traitement d’affections saisonnières ou dégénératives.

Là encore, la Communauté française se sent obligée de se mêler de tout en diffusant des spots publicitaires abusifs concernant l’emploi des antibiotiques, d’une part, et d’autre part, assimilant les dangers des anti-inflammatoires au danger du SIDA. Où va-t-on ?

-Les cours de formation continue.

En soi, la formation continue est une chose excellente. Un médecin, digne de ce nom, se doit de lire, d’apprendre et de se tenir au courant des nouveautés techniques et scientifiques. Mais le pouvoir politique se sent autorisé à contrôler, à créer un système d’accréditation dont on peut être exclu si l’on obéit pas à la règle formelle. Vous n’avez pas autant de points ? Vous avez prescrit trop de médicaments, vous avez prescrit trop d’examens ? Bref, vous avez exercé votre métier de médecin selon votre conscience et non selon la règle ! plus d’accréditation !

Des politiciens, qui parfois n’ont même pas une idée de ce qu’est la médecine, se sentent obligés de considérer les médecins comme des enfants ou de simples exécutants, chargés d’obéir à leurs lubies idéologiques. Faut-il réellement de longues études universitaires pour en arriver là ?

Dr Adèle Lanuit

 

 

(Bastion n°62 de juin 2002)

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