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LE VOTE ETHNIQUE

La dernière vague d'immigration, non européenne et musulmane, ne se fond pas dans le corps social comme les précédentes. On le constate partout, y compris dans le domaine politique où l'attachement à la communauté d'origine domine.

 

UN SONDAGE D'OPINION REVELATEUR

Une enquête d'opinion réalisée, en 1997, à Bruxelles nous renseigne sur les préférences des immigrés quant à la composition ethnique des listes.[1]

Voici la répartition des réponses à la question "Au cas où vous pourriez voter pour les élections communales, comment voteriez vous?". 


 

 

La moitié des Turcs et Marocains, qui expriment un vote, se mettent à part et optent pour des listes ethniques.

 

ELECTIONS MUSULMANES DU 7 DECEMBRE 1998

Les responsables de l'islam de Belgique sachant bien que les musulmans, même naturalisés, préfèrent voter pour quelqu'un de leur origine et voulant assurer la présence des minorités ont organisé une représentation par groupe ethnique aussi bien dans l'assemblée élue que dans l'exécutif. Des sièges ont été attribués à quatre groupes : les Marocains, les Turcs, les Belges et les autres. Les Belges ayant un parent ou grand-parent marocain (ou turc, etc.) étant considérés comme marocains (ou turcs, etc.). C’est ainsi que les six sièges marocains de  l'exécutif, sont occupés par 4 Belges d'origine marocaine, dont le président qui est inspecteur au ministère des Finances, et 2 Marocains.

 

ELECTIONS REGIONALES DU 16 JUIN 1999

Dans plusieurs quartiers de Bruxelles, lors de la campagne électorale de mai-juin 1999, on a vu fleurir une propagande qui aurait pu convenir à un parti de l'étranger.

-    Ici, une affichette d'Ecolo montre un groupe de sept candidats, deux autochtones et cinq allochtones, chapeautés d'un titre bilingue français arabe "Tous citoyens".

-    Là, dans un tract, Amidou Si M'Hammed, candidat P.S., brigue le suffrage des Belges mais ses priorités concernent surtout les étrangers : "Les droits de vote et d'éligibilité devraient être étendus à l'ensemble des habitants vivant sur le territoire belge depuis un certain temps". (...) "Il faut oser mener une campagne de régularisation des clandestins" "(...) mise sur pied d'actions positives en faveur des populations d'origine immigrée (...). Il faut aussi permettre l'accès à la fonction publique des ressortissants des Etats non-membres de l'Union européenne". Naturellement, s'y ajoute la lutte contre "l'extrême droite" c'est à dire contre ceux qui s'opposent à ces mesures.

Résultat: 8 des 75 élus au Conseil régional bruxellois, soit 11 %, sont nés au Maghreb[2] alors que la proportion d'électeurs d'origine maghrébine est d'environ 6 %. Ils ont recueilli des suffrages supérieurs à la représentativité de leur communauté, mais surtout des voix de préférence qui, votes multiples inclus, faisaient 5,2 % des votes exprimés, ce qui a permis à quatre candidats se classer en ordre utile.

La préférence ethnique s'est marquée par le choix de candidats immigrés et non par le choix de listes immigrées telles que NOOR (islamiste), MARS ou Gauche Plurielle.

Seuls  les belgo-maghrébins ont émergé, les autres groupes, moins nombreux, moins mobilisés, n’ont directement délégué personne.

Sur les huit élus, 4 sont au PS (13 élus), 2 au PRL-FDF-MCC (27 élus) et 2 à Ecolo (14 élus). S'ils s'aventuraient à se compter à part, comme l'assemblée musulmane le suggère[3], le Conseil régional bruxellois se composerait comme suit

  Belgo-maghrébins    8

  Belgo-flamands        11

  Belgo-francophones 56

Avec la montée démographique, la permanence des problèmes communautaires et immigrés, cette menace pourrait prendre corps sous l’une ou l’autre bannière.

 

PREOCCUPATIONS D'UN ELU

Fouad Lahssaini, élu régional de 42 ans, "politicien belge malgré lui"[4], quitte Casablanca pour la Belgique à l’âge de 20 ans afin d'y poursuivre des études universitaires puis s'y installe comme psychologue et se constitue une clientèle  essentiellement marocaine. Le lendemain de sa naturalisation, il s'engage dans le parti  écolo. "Changer de nationalité, c'était dur, car je reste attaché à ma culture et j'aurais préféré rester marocain. Cette souffrance a déclenché mon engagement politique. J'ai voulu combattre le fait qu'il faille se naturaliser pour pouvoir voter en Belgique." Ecolo a précisément inscrit cette revendication dans son programme." F. Lahssaini compte s'impliquer dans les contrats de quartier et de sécurité, c’est à dire dans la question "immigration et délinquance".

Ce député belge s'est engagé en politique parce qu'il n'a pu rester marocain pour en faire et a choisi Ecolo pour cette raison ! Représente-t-il les Bruxellois ou le groupe ethnique dont il est issu ? (Le Belge qui veut rester belge est lui accusé au mieux d’ethnocentrisme…).

Chez d'autres personnalités politiques d'origine maghrébine, on note des enchaînements de circonstances analogues, un aussi vif sentiment identitaire et des préoccupations centrées sur l'immigration et l'islam.

 

UN ENSEIGNEMENT EXEMPLAIRE VENU DES PAYS-BAS

Lors des élections municipales hollandaises de 1994, 56% de l'électorat marocain apporta ses suffrages au parti Groenlinks co-dirigé par le populaire Mohamed Rabbae[5]. Emigrant du Maroc à l'âge de 24 ans, celui-ci s'est engagé chez les Groenlinks plutôt que chez les socialistes car ce parti était le seul à se prononcer contre le soutien à la politique des Etats-Unis lors de la guerre du Golfe. La gauche écologiste a donc attiré plus de la moitié des suffrages marocains pour des raisons ethniques liées à un choix particulier en politique internationale dans une élection locale. Certes M. Rabae exprime une opinion partagée par une fraction de Néerlandais mais c’est surtout celle de la majorité de l’opinion arabe - pas celle des Etats; ce qui fait problème, c'est cette coagulation ethno-idéologique contradictoire avec celle du pays d'accueil doublée d'ambiguïté : quand l'invité marocain prend le parti arabe, joue-t-il au cheval de Troie ? En cas de conflit extérieur, va-t-il nous affaiblir ? 

 

LA SEPARATION ETHNIQUE

Huit élus nés en Afrique du Nord, certains venus adultes faire de la politique directement, sans attendre une génération, aussi massivement, aussi avidement ?, c'est nouveau. Jusqu'ici on ignorait l'origine nationale des hommes politiques, maintenant elle prévaut sur le programme. La démocratie d'opinion va céder le pas au comptage identitaire, le débat va disparaître car celui qui met en cause un fait lié à un groupe ethnique d'origine étrangère - que ce soit le voile islamique, la délinquance ou les clandestins – est accusé de "racisme" ; ce procédé disqualifiant est un moyen habile pour une minorité de faire taire toutes réticences.

Il y a vingt ans, le vote ethnique évoquait des mouvements à la marge, par exemple l’électorat américain d’origine grecque était flatté par un candidat présidentiel. Maintenant cela se produit  chez nous et avec une toute autre signification : ce vote entre dans tous les calculs électoraux, modifie constamment le rapport des forces au profit des «  islamo-progressistes »[6] - en France et nous n’avons pas de raisons de douter qu’il en soit autrement chez nous, plus des trois quarts des immigrés maghrébins leur apportent leurs suffrages – et rend possible, voire probable, des conflits politiques articulés sur l’ethnique.

La population maghrébine, et aussi turque mais très différemment, se transplante avec ses cadres : médiateurs scolaires, éducateurs de rue, stewards, professeurs de religion musulmane (800), aumôniers de prisons (12 au 1/1/2000), psychologues ou sociologues spécialisés, hommes politiques. Subventionnée par des aides spécifiques (discriminations positives pour les écoles, contrats de sécurité, subvention prochaine d'imams, etc.) qui s'ajoutent à celles dues à sa situation particulière (aide au logement social, allocations familiales, etc.), une société parallèle vivant dans ses propres quartiers se forme et impose ses propres mots d’ordre, régularisation des illégaux, naturalisation sans intégration, etc. - qui sont du pur chauvinisme (pro-maghrébin) - à la société politique belge qui naïvement s’imagine être universelle.

Le remarquable militantisme des Belges d’origine maghrébine, l'ampleur et la complexité des questions ethniques, sans oublier la pression des pays d’origine vont pousser nos responsables à reconnaître, sans le dire, une autonomie politique du champ immigré.

Le droit de vote aux non-européens directement ou par naturalisation express va accélérer le sécessionisme qui  se manifeste partout où des minorités musulmanes significatives existent. Danger !

 AUGUSTIN


[1] "Minderheden in Brussel. Sociopolitieke houdingen en gedragingen", 1999 VUB. M. Swyngedouw, K. Phalet et K. Deschouwer (ed)

[2]Pour information, un neuvième élu est originaire du Moyen-Orient (NDLR)

[3] Voir aussi encadré

[4] suivant « Le Soir » du 30 novembre 1999

[5] D’après un sondage, voir "Nouvelle Tribune" de décembre 97. n 17. H.Bousetta. F.Saïdi

[6] Les régimes les moins « progressistes » sont en Islam non en Occident, voir Pakistan, Afghanistan, Arabie saoudite, etc. , c’est pourquoi les accointances socialistes et musulmanes nécessitent des guillemets.

(Bastion n°40 de février  2000)

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